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L’Isère, territoire cyclable

Diversité des paysages et des reliefs, qualité du réseau routier et souci constant d’œuvrer autant pour l’approche touristique qu’utilitaire du vélo : il est temps de se pencher sur la politique cyclable du département hôte de la Conférence nationale du tourisme à vélo 2024, un grand rendez-vous annuel où sera dévoilée la stratégie nationale en la matière.

Le département de l’Isère en bref :

  • Superficie : 7 431 km2
  • Population : 1,28 million d’habitants
  • Densité : 157 habitants/km2
  • Préfecture : Grenoble

Entretien avec Jean-Pierre Barbier

Président du conseil départemental de l’Isère

Quelles ont été les grandes étapes de la politique cyclable du Département jusqu’à ce jour ?

J’ai pris mes fonctions à la tête du Département en 2015. Notre institution a toujours eu conscience qu’il y avait beaucoup à faire, avec ce distinguo de longue date entre un secteur urbain relativement simple à sécuriser et des secteurs hors agglomération pour lesquels il nous fallait être particulièrement vigilants. Nous avons toujours veillé à mutualiser les approches touristiques, incontournables chez nous avec un développement sur quatre saisons, et les approches pendulaires, avec cette idée de réussir à terme à traverser notre département du nord au sud et d’est en ouest. Nous travaillons également avec les communes et les intercommunalités pour permettre le développement de trajets sécurisés jusqu’aux collèges. Enfin, s’il faut citer un paramètre qui a été décisif au cours des dernières années, c’est indéniablement l’essor du vélo à assistance électrique, que nous avons accompagné dès 2016 et dont le succès ne s’est pas démenti, a fortiori depuis la crise sanitaire. Il permet aux moins sportifs de se mettre au vélo et de sillonner les voies vertes et ça, c’est une petite révolution !

Quels sont les grands axes de la politique cyclable actuelle ?

Un Isérois sur quatre dit utiliser son vélo au moins une fois par semaine et plus de 7 % des actifs s’en servent pour se rendre sur leur lieu de travail au quotidien. Notre stratégie opérationnelle a été redéfinie en 2020, en conformité avec la loi LOM de 2019 et dans la continuité de la stratégie Air Climat Énergie que nous avons adoptée en 2018. Elle s’articule depuis autour de six axes : développer les infrastructures cyclables ; mettre en œuvre les services pour accompagner la pratique ; accompagner les changements de comportement ; favoriser la pratique sportive ; positionner l’Isère comme une terre de vélo pour le tourisme et, enfin, promouvoir l’Isère en tant que terre de vélo à l’occasion de grands évènements, comme nous le faisons chaque année ou presque avec les épreuves cyclistes du Tour de France et du Critérium du Dauphiné, sur l’Alpes Isère Tour, mais aussi sur les parcours cyclo-touristiques d’une épreuve comme la Course de la Résistance qui, chaque 8 mai, permet de redécouvrir des lieux emblématiques de la Résistance sur un territoire différent ou grâce aux Échappées iséroises, qui consistent à fermer un certain nombre de cols emblématiques pour permettre aux Isérois de les monter en toute sécurité.

Quel budget cela représente-t-il chaque année ?

Le budget vélo annuel du Département était de 2,5 millions d’euros en 2020. En 2024, il est de 6,4 millions d’euros et représentera sur l’ensemble du mandat un total de 30 millions d’euros investis.

À quelles difficultés êtes-vous confrontés ?

La principale difficulté est celle des autorisations administratives et environnementales. Ce sont des étapes chronophages mais indispensables, auxquelles nous sommes habitués même si parfois nos usagers ont du mal à le comprendre. Qu’il s’agisse d’infrastructures ou de sécurité, aucun acte n’est anodin. Car, in fine, toute action doit être pensée pour assurer à la fois la sécurité des usagers, la cohérence du tracé et le maillage des territoires, tout en répondant aux besoins des habitants des communes et des intercommunalités.

Quels sont les points saillants des actions cyclables en cours ?

Beaucoup a déjà été fait. Sur un itinéraire comme les 12 km de la Via Chartreuse, l’itinéraire touristique devenu peu à peu pendulaire, car essayer le vélo sur des voies vertes peut inciter les gens à changer leur mode de déplacement. Nous avons évidemment la ViaRhôna qui traverse le département dans le Haut-Rhône dauphinois et l’Isère Rhodanienne, ainsi que La Belle Via, longue de 123 km en Isère, qui est terminée dans le Sud Grésivaudan en agglomération grenobloise et qui est encore en itinéraire provisoire dans le Grésivaudan. Sur ce territoire, les travaux de l’itinéraire définitif ont démarré en juin. Une première section sera définitive dès l’automne 2024, l’idée étant d’avancer section par section, et de la terminer en décembre 2026. Des études sont également en cours concernant le gros projet de la Via 5 Lacs, financé à 50 % par la Région et à 50 % par le Département. Elle traversera la Haute-Savoie, la Savoie et l’Isère et reliera le lac Léman à celui de Paladru en passant par ceux d’Annecy, du Bourget et d’Aiguebelette.

Vinay – Pays de la noix ©P.Cholette

Véronique Lespinats

Adjointe au chef du service Études stratégie investissement à la direction des Mobilités du conseil départemental de l’Isère

Le département de l’Isère est actif au plan cyclable tant en matière touristique qu’en matière utilitaire. Ça a toujours été le cas ?

Tout à fait, l’un ne va pas sans l’autre. Notre territoire agit autant dans ses secteurs montagneux de type Oisans, Vercors ou Chartreuse, qu’au niveau du vélo du quotidien qui concerne notamment les agglomérations de Vienne, Bourgoin, Voiron ou Grenoble. Ces différents enjeux sont particulièrement visibles sur un itinéraire comme La Belle Via.

Quelles sont les actions mises en place pour favoriser les déplacements à vélo des collégiens ?

Il y a trois axes. Le premier concerne la réflexion sur les infrastructures proprement dites. Une centaine de collèges sont concernés sur notre territoire, il est donc important de définir le meilleur accès possible pour chacun de leurs élèves. L’autre enjeu est celui du stationnement et le dernier concerne le développement pendant les cycles d’EPS du dispositif interministériel Savoir Rouler à Vélo.

Comment coordonnez-vous les différentes actions menées sur le territoire départemental ?

Au plan humain, deux personnes à temps plein dédiées à la politique cyclable à la direction des Mobilités travaillent en interne avec les différents services et les usagers. Au plan technique, nous avons un référentiel en cours de mise à jour. Nous avons une stratégie décisionnelle en six axes [cf. entretien avec Jean-Pierre Barbier, ci-contre] et concernant plus précisément l’infrastructure, nous agissons sur deux volets. D’abord par l’octroi d’aides pérennes et lisibles pour accompagner financièrement les communes et les intercommunalités qui investissent dans le vélo. Cette aide peut osciller entre 30 et 70 % du montant final en fonction des projets. Nous cherchons en effet à favoriser les échanges techniques projet par projet avec les communes ou les intercommunalités qui n’en auraient pas l’expertise. Ça permet un dialogue et de faire le lien avec nos projets, ainsi qu’entre les projets des collectivités locales. Ça permet également d’appuyer la question de la desserte des collèges. Nous avons ainsi pu accompagner 65 projets depuis juin 2022.

Quel est l’autre temps dont vous parliez ?

L’autre aspect sur le plan de l’infrastructure concerne les aménagements réalisés en maîtrise d’ouvrage propre comme les pistes ou bandes cyclables que nous aménageons le long des routes départementales, et les passerelles en projet pour franchir les autoroutes ou les cours d’eau. Notre ambition est d’augmenter le linéaire d’aménagements cyclables et de voies vertes pour permettre un maillage cyclable sécurisé favorisant la desserte de sites d’intérêt majeur.

Fête du vélo en Isère ©Département de l’Isère

Entretien avec Christophe Suszylo

Vice-président du conseil départemental de l’Isère en charge du Tourisme et de l’attractivité, président d’Isère Attractivité

Quelle place occupe le vélo au sein des actions d’Isère Attractivité ?

Une place importante et croissante. Nous avons une belle rivière le long de laquelle il est possible de cheminer paisiblement, le sillon alpin et tous ces massifs à contempler et à grimper. Le Tour de France fait régulièrement étape sur notre territoire – ce sera encore le cas cet été puisque l’épreuve féminine s’achèvera au sommet de l’Alpe d’Huez -, nous organisons chaque année les Assises nationales du VAE… Tous ces efforts sont fortement encouragés par le président du Département dont l’agence Isère Attractivité est un peu le bras armé sur la thématique du vélo.

L’un de vos projets phares est La Belle Via. De quoi s’agit-il ?

Les 7 400 km2 de notre territoire comptaient déjà un fort passage avec la ViaRhôna. C’est une action qui a été initiée en 2016 et qui existe depuis 2021. Elle représente un investissement de 15 millions d’euros pour le Département et rassemble les départements de la Savoie, de la Haute-Savoie, de la Drôme et de l’Isère. Notre territoire accueille 60 % de cet itinéraire, entre Pontcharra et Pont de l’Isère. Elle permet une découverte du territoire en alternant rive droite et rive gauche de l’Isère. Grâce à des boucles additionnelles sur différentes sections du territoire, il est aussi possible d’en apprendre davantage sur le monde agricole traversé et les 1 500 produits locaux proposés par la marque IS HERE.

Vous avez d’ailleurs récemment organisé un éductour…

Oui, au printemps dernier, cinq tour-opérateurs français sont venus découvrir cette véloroute sur deux journées. Ce fut l’occasion de voir les différentes adresses à connaître sur la partie iséroise de ce parcours ou d’en savoir plus sur la démarche Accueil Vélo, avec des idées de séjours cyclables reliant le lac de Paladru aux balcons de Chartreuse et un itinéraire en direction de la Drôme depuis Vinay. Beaucoup a déjà été fait et beaucoup reste à faire. Notre objectif reste d’apporter un produit en cohérence avec les besoins de nos usagers, notamment en matière de sécurisation des franchissements.

De nombreux colloques et salons sont organisés sur votre territoire sur la thématique vélo. Isère Attractivité est d’ailleurs co-organisatrice de la Conférence nationale du tourisme à vélo, les 12 et 13 juin à Grenoble. Quelles sont les thématiques abordées ?

Après les temps habituels consacrés à l’assemblée générale de France Vélo Tourisme et à la plénière, le thème central de cette édition (« Destination France à vélo : cap vers 2030 !) est ensuite décliné au cours de plusieurs tables rondes s’attachant à répondre aux interrogations qui en découlent : le futur du tourisme à vélo est-il le gage d’un tourisme durable ? Comment développer une offre de tourisme à vélo adaptée aux enfants et aux adolescents ? Hébergement à la nuitée, quelles solutions ?, sont quelques-unes des discussions qui seront amorcées entre deux visites à vélo du Grenoble historique ou des œuvres de Street Art qui ornent les murs de la ville.

La Belle Via en Isère ©A.Gelin

Trois questions à Julien Scotto

Coordinateur de La Belle Via au sein de l’agence touristique Isère Attractivité

Qu’est-ce que La Belle Via ?

C’est un itinéraire cyclable qui combine sur 369 km les véloroutes nationales V62 et V63 entre Valence et les lacs du Bourget et d’Annecy en passant par l’Isère et Grenoble. Cette évolution est le fruit d’une étude marketing lancée en commun en 2020 par les agences touristiques Savoie Mont Blanc, Isère Attractivité et Drôme Attractivité. L’itinéraire se veut facile et accessible au plus grand nombre puisqu’il passe en vallée et se connecte de part et d’autre à l’EuroVelo 17-ViaRhôna, tout en permettant des vues magnifiques sur les massifs alentours. Il en fait un trait d’union entre quatre départements : la Haute-Savoie, la Savoie, la Drôme et l’Isère. La Belle Via a la particularité d’offrir deux points de départ et deux points d’arrivée, en Savoie et en Haute-Savoie, et est surnommée « l’échappée belle entre lacs, montagnes et vergers ». C’est d’ailleurs ce que symbolise son logo tricolore, avec le vert des paysages, le bleu des lacs et des rivières et le orange du soleil.

Quelle place occupe cet itinéraire dans la politique cyclable du département de l’Isère ?

Les mobilités actives sont l’une des priorités de développement du Département. Cent-vingt-trois kilomètres de La Belle Via passent par le territoire isérois et de nombreuses boucles cyclables sont agrégées en sortie de territoire afin de découvrir les atouts touristiques environnants.

Quelles sont les échéances à venir à court ou moyen terme ?

C’est encore un itinéraire récent, qui se structure peu à peu et vient d’être intégré sur le site web de France Vélo Tourisme. Nous travaillons actuellement sur un plan d’actions autour de plusieurs projets de communication : campagnes et voyages de presse, site Internet dédié, etc. À plus brève échéance, nous mettons à jour avant l’été le jalonnement, afin qu’il soit aux couleurs de La Belle Via.

Propos recueillis par Anthony Diao

Vélo & Territoires, la revue