Premier coup de pédale du Plan vélo 2.0
Après l’annonce prometteuse d’un nouveau Plan vélo en septembre dernier, l’attente était longue. Les promesses de 250 millions d’euros pour 2023 prennent la première forme avec un sixième appel à projets doté d’une enveloppe de 100 millions d’euros pour des projets d’infrastructures cyclables. Un premier signe de bonne volonté en direction des collectivités ? Tour d’horizon des annonces faites ce 20 janvier qui ne rassurent pas encore tout à fait.
Contexte et enjeux
Avec une progression de 31 % par rapport à 2019 et de 8 % par rapport à 2021, la fréquentation vélo a poursuivi son essor en 2022 en France selon le bilan provisoire publié par Vélo & Territoires. Mais le rythme risque de ne pas être suffisant pour atteindre les objectifs nationaux de 12 % de part modale à horizon 2030. Dans un contexte budgétaire très délicat des collectivités, les défis sont de taille. Les près de 1 300 territoires répondants à l’Enquête nationale sur les politiques modes actifs menée par Vélo & Territoires et le Club des villes et territoires cyclables et marchables (dont les résultats seront publiés au printemps 2023) confirment que les collectivités ont de l’ambition sur le vélo. Ce sont ces dernières qui sont à la manœuvre pour proposer des aménagements et des services vélos, dans les territoires denses et moins denses. Mais sans l’effet levier des financements nationaux les collectivités seules « ne pourront pas faire face aux énormes besoins de financement pour sécuriser la pratique du vélo », soulignait l’Alliance pour le vélo dans son courrier adressé à Elisabeth Borne le 5 janvier dernier. Ce sixième appel à projets, lancé par le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires et le ministre délégué chargé des Transports ce 20 janvier, donne une première réponse aux territoires… en attendant plus.
Priorité aux territoires peu denses
Dans le sillage des appels à projets antérieurs, ce nouveau dispositif soutient les projets d’aménagements cyclables type « discontinuité » et « itinéraire sécurisé ». Il est ouvert à tous les maîtres d’ouvrage publics, notamment les communes, les départements, les groupements de collectivités, dès lors que le projet porté s’inscrit dans une politique cyclable cohérente à l’échelle du territoire et qu’il respecte les recommandations techniques en matière de sécurité élaborées par le Cerema. Les revêtements choisis doivent permettre une praticabilité de l’aménagement en toute saison et une durabilité dans le temps. Les candidats sont invités à déposer leur projet avant le 21 avril (inclus) pour une annonce des lauréats prévue en septembre 2023. Avec un taux d’aide de 50 % en zone peu dense et de 15 % en zone dense (unité urbaine de plus de 100 000 habitants), une attention particulière est accordée aux territoires peu denses et aux Outre-mer. Si les territoires peu denses ont bien la volonté d’agir, les moyens financiers et humains y font souvent défaut et les cyclistes y rencontrent encore de nombreuses contraintes. Ces financements apportés par l’État contribuent à intensifier la réalisation d’aménagements cyclables identifiés comme nécessaires dans des secteurs à enjeu et coûteux du fait de leur ampleur.
Des annonces encourageantes, mais pas suffisantes
Ces 100 millions d’euros sont une première réponse concrète aux 250 millions d’euros annoncés pour 2023 en septembre dernier. Mais ces financements nationaux, sont-ils suffisants pour soutenir l’ambition des collectivités et, ce faisant, l’atteinte des objectifs nationaux pour rattraper le retard européen de la France sur sa part modale vélo et rendre le vélo accessible à toutes et tous et partout sur le territoire ? Une chose est sûre. Les actions doivent se poursuivre pour transformer les promesses en actes sur les infrastructures et le stationnement vélo. Pour les 150 millions d’euros restants pour 2023, le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires et le ministre délégué chargé des Transports promettent « le lancement d’un nouveau dispositif pour accompagner les territoires les moins urbanisés (communautés de communes ou communautés d’agglomération) au premier semestre 2023 afin d’accélérer le déploiement de leur politique cyclable » dans un communiqué de presse publié ce 20 janvier. « Le reste des financements de 2023 sera consacré aux stationnements sécurisés ainsi qu’à des projets vélos pour les Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024. »
Rappelons que la France est 21e en Europe en termes d’investissements nationaux par habitant par an selon un rapport publié par la Fédération européenne des cyclistes (ECF) en décembre dernier. En additionnant les investissements nationaux et les fonds européens, l’investissement annuel total par habitant n’atteint que 1,2 €. C’est 4,4 fois moins que l’Italie (5,3 €), 7,7 fois moins que l’Allemagne (9,2 €), 11,3 fois moins que les Pays-Bas (13,6 €) et 30 fois moins que l’Irlande (36 €). « Il faut que l’État investisse à minima 2,5 milliards d’euros sur cinq ans pour doubler le patrimoine cyclable de la France sur le quinquennat », a insisté l’Alliance pour le vélo dans son courrier. Le vélo doit être placé au cœur de la planification écologique de l’État pour apporter une vraie réponse aux territoires et mettre des moyens en face des ambitions nationales affichées.
Dorothée Appercel
En savoir plus :
- Le cahier des charges et les annexes sont disponibles sur le site web du ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires
- Le communiqué de presse du ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires du 20 janvier