Départementales et régionales 2021 : le vélo part en campagne
Extrait de Vélo & Territoires, la revue n°63
Les élections de juin 2021 marqueront-elles un nouveau tournant pour les territoires dans le déploiement de la solution vélo ? 2020 a plus que jamais affiché la petite reine comme symbole de liberté et mode de déplacement à part entière. D’une part, le développement d’infrastructures, d’équipements et de services dédiés est de plus en plus plébiscité par les Français. D’autre part, le vélo fait sa place au sein des politiques publiques. Au regard de leurs compétences, les départements et les régions sont des acteurs de premier plan pour déployer des démarches cyclables ambitieuses et pro-actives. Alors profitons de ce scrutin pour « parler vélo » !
Les départements et les régions au cœur de la France à vélo 2030
Les chiffres de fréquentation de janvier à début mai 2021 réaffirment l’engouement croissant des
Français pour le vélo, avec +28 % par rapport à 2019 sur la même période. Ces indicateurs sont
encourageants pour maintenir la dynamique cyclable de 2020, voire la rehausser. Néanmoins
pour porter la France au rang des grandes nations cyclables, un investissement d’au moins 30 euros par an et par habitant en faveur du vélo, dès à présent et à long terme, sera nécessaire.
Chaque échéance électorale est une période clé pour interpeler, faire réagir et convaincre
les candidats de l’importance d’une politique cyclable ambitieuse et transversale. À l’instar des
municipales de 2020, au cours desquelles le vélo aura été le sujet transport numéro un débattu
par les candidats, la FUB et Vélo & Territoires entendent placer l’ambition vélo au cœur de la campagne pour les départementales et les régionales. L’objectif ? Couvrir petit à petit la France entière de systèmes vélo structurants durant les six prochaines années avec, en ligne de mire, les 12 % de part modale vélo en 2030. Un objectif en phase avec la stratégie nationale bas carbone et le cap stratégique de la France à vélo 2030 de Vélo & Territoires.
L’effet levier passe par un engagement fort sur le terrain. Les départements et les régions ont les
moyens d’agir sur le vélo, certains l’ont prouvé depuis plus d’une décennie déjà. L’Enquête Territoires conduite en 2019 par Vélo & Territoires, avec une participation record de 14 régions et 92 départements, révélait l’« appétence cyclable » des collectivités. Deux ans plus tard, le peloton
est lancé et 87 % d’entre elles disposent d’une stratégie vélo active ou en cours d’élaboration. La planification progresse, les budgets vélo sont en hausse, mais des défis restent à surmonter. C’est tout un pan de politiques publiques transversales que couvre la question vélo : l’aménagement du territoire et la voirie, à travers un maillage fin et équilibré, mais aussi l’intermodalité, les services, les solidarités, l’éducation ou encore le tourisme. Autant de sujets sur lesquels les départements et les régions peuvent se mobiliser.
Des candidats invités à s’exprimer
Ce renouvellement est en ce sens une formidable opportunité dont la FUB et Vélo & Territoires, avec le soutien du Club des villes et territoires cyclables et de l’Union Sport & Cycle, se saisissent pour inviter les candidats à viser plus haut et à « muscler » leurs programmes vélo. Initiée à l’occasion de la Présidentielle 2017, la campagne « Parlons Vélo » est ainsi pour la première fois déclinée à l’échelon départemental et régional. À travers une plateforme renouvelée, la parole est donnée aux candidats, interrogés en ligne sur leur volonté d’agir en faveur du vélo via une vingtaine de questions co-construites avec les associations d’usagers. Au programme de ce questionnaire ? L’ensemble des composantes d’une politique cyclable transversale et équilibrée, adaptée au territoire. Avec près de 40 000 candidats en lice en 2015 pour les deux scrutins confondus, la FUB, Vélo & Territoires et leurs partenaires ont la volonté d’engranger un maximum de réponses et de pouvoir ainsi mettre un coup de projecteur sur l’engagement de chacun en faveur de la petite reine. Un cahier de vingt propositions pour développer le vélo dans les départements et dans les régions, ainsi que des contenus pédagogiques et concrets alimenteront la plateforme au fur et à mesure : un bon moyen de sensibiliser l’opinion, de valoriser les actions menées, de se ravitailler en idées et pourquoi pas inspirer quelques candidats. Et des initiatives vélo, il y en a tout un rayon. Cette plateforme marque une première étape. La phase post-électorale s’avère un temps tout aussi essentiel pour guider les nouveaux élus dans la définition, l’expérimentation et l’animation de leur politique cyclable 360°. « Un mandat pour agir sur le vélo », le compte à rebours est lancé !
Un questionnaire pour quels enseignements ?
Les réponses apportées au questionnaire n’ont pas vocation à attribuer de bons ou de mauvais points aux programmes des candidats. Elles visent à mieux appréhender les thématiques qu’ils jugent prioritaires et à cibler celles pour lesquelles un accompagnement pourra s’avérer nécessaire. Si certaines compétences permettent de toucher du doigt les questions centrales en matière de stratégie vélo, infrastructures et mobilité en tête, d’autres méritent une attention particulière au regard des atouts du vélo en matière de santé, d’insertion ou d’émancipation par exemple. Le questionnaire entend créer une émulation entre les candidats qui pourront s’inspirer des initiatives remarquables mises en avant sur la plateforme et ainsi affûter leur stratégie vélo.
En savoir plus : www.elections.parlons-velo.fr
Un mandat pour agir sur le vélo, une formation pour les élus
Le mandat à venir pour la période 2021-2027 marque la dernière ligne droite pour tenir le cap de la France à vélo 2030. Quelle ambition se fixer à l’échelle régionale et départementale ? Comment cibler les actions prioritaires ? Comment les financer ? Quels partenaires mobiliser ? Quel rôle concret les départements et les régions peuvent-ils jouer au regard de leurs compétences et de leurs moyens propres ? Autant de questions auxquelles Vélo & Territoires tâchera de répondre
pour orienter les nouveaux élus sur des pistes de travail et leur permettre de tenir le haut du pavé. Une formation sera proposée par Vélo & Territoires, en lien avec l’ADMA (Académie des mobilités actives), aux conseillers départementaux et régionaux adhérents en charge des questions vélo pour les aguiller dans leur rôle. La formation leur permettra de faire le point sur les attributions de leur collectivité en matière de vélo et de les guider dans leur démarche pour développer la « cyclabilité » de leur territoire. Elle s’appuiera sur des contenus pédagogiques et des exemples français ou étrangers concrets et inspirants pour aborder les questions relatives à la gouvernance, aux moyens d’agir (humains et financiers), aux enjeux transversaux et au « faire-savoir ».
FOCUS DEPARTEMENTS
Les départements et le vélo, de multiples façons d’intervenir
Si la LOM a confié l’exercice effectif de la compétence mobilité aux régions et aux EPCI qui souhaitaient s’en emparer, le département n’en reste pas moins un acteur légitime, stratégique et bien placé pour agréger les politiques cyclables des intercommunalités, harmoniser les interventions et définir une stratégie cohérente à l’échelle du territoire. Son rôle est essentiel pour prioriser ce qui relève du structurant et pour ainsi peser sur le développement du vélo, par une approche intégrée comme en témoignent les réflexions menées actuellement sur les réseaux express vélo en Haute-Garonne ou en Ille-et-Vilaine. En tant que gestionnaire de la voirie,
le département est souvent le plus compétent pour intervenir en maîtrise d’ouvrage, que ce soit pour sécuriser les abords des collèges ou pour garantir la continuité entre deux bourgs hors agglomération, à l’instar du Plan mobilité de la Mayenne. Garant des solidarités et de la cohérence territoriale, il peut également développer des dispositifs d’accompagnement (contrats de territoires en Eure-et-Loir, ingénierie départementale dans l’Aude…) pour inciter et stimuler les EPCI à créer leur propre schéma vélo. Le département a toute sa place pour favoriser une mobilité inclusive et offrir le choix du vélo en ciblant en priorité les jeunes et les publics les plus vulnérables. Sur le plan touristique, nombre de départements se saisissent de l’essor du slow tourisme, accéléré par la crise sanitaire et le besoin d’activités de plein air : l’éventail, la qualité d’équipements et de services proposés le long des itinéraires cyclables placent les territoires dans la course pour faire de la France la première destination mondiale du tourisme à vélo. Et ne l’oublions pas, en zone rurale, le département se place souvent au premier rang des employeurs locaux. L’acculturation au vélo qu’il peut proposer à ses agents, via un plan de mobilité en Finistère, de la formation dans les Pyrénées-Atlantiques, la mise à disposition d’une flotte de vélos dans le Doubs ou encore le déploiement du Forfait mobilités durables et de la démarche employeur pro-vélo sont autant de moyens de mener le train, en bon capitaine de route, pour faire évoluer les pratiques et assoir la place du vélo dans les déplacements du quotidien.
FOCUS REGIONS
Les régions pour affûter une stratégie vélo durable et intégrée
Cheffe de file de la mobilité et de l’intermodalité, la région en a sous la pédale. Depuis quelques
années, l’approche des politiques cyclables a changé de braquet, avec la prise en compte de
la solution vélo dans les SRADDET (Schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires), les schémas régionaux du tourisme, voire les SRDEII (Schéma régionaux de développement économique d’innovation et d’internationalisation) ou encore les
plans régionaux santé environnement comme en Normandie. Des politiques cyclables transversales se développent à travers des plans vélo ambitieux comme en Centre-Val de Loire ou en Bourgogne-Franche-Comté. Départements et régions avancent main dans la main pour aller
plus loin dans la planification et cibler leurs investissements vers des aménagements cyclables
structurants : les territoires ont ouvert 1 784 km sur le Schéma national et les schémas locaux en
2020, du jamais vu ! Une avancée notoire, que ce soit pour des déplacements utilitaires ou à des
fins touristiques et récréatives. Mais il faut tenir la corde et éviter les bordures. Emport des vélos
dans les trains, les cars ou les bateaux, complété de stationnement sécurisé à proximité des pôles
d’échanges multimodaux, l’enjeu est de lever les freins aux déplacements intermodaux et d’activer
tous les leviers pour assurer la complémentarité entre les modes de déplacement. Et le jeu en vaut
la chandelle : avec des retombées économiques directes du vélo estimées à 8,2 milliards en France, une filière du cycle en constante progression (2,7 millions de vélos vendus en 2020 dont 514 600 VAE selon l’Observatoire du cycle de l’Union Sport & Cycle) et une croissance de l’emploi dans le secteur (1 million d’euros investis génère vingt emplois ETP dans l’économie du vélo contre trois pour l’industrie automobile), les régions ont tout intérêt à structurer et accompagner son expansion, comme en témoignent les clusters Mobilités actives et durables en Auvergne-Rhône-Alpes et Vélo Vallée en Occitanie ou le soutien à l’entreprenariat à vélo appuyé par la Nouvelle-Aquitaine. Une ambition et une exemplarité que la collectivité doit se fixer pour démocratiser l’usage du vélo à l’échelle régionale.
Trois questions à Olivier Schneider, président de la FUB et Camille Thomé, directrice de Vélo & Territoires
- Pourquoi avoir choisi de mobiliser vos deux structures Vélo & Territoires et la FUB pour mener cette campagne ?
Camille Thomé: Avec 66 départements et 11 régions parmi nos adhérents, nous associer à la FUB pour mener cette campagne a été une évidence. Ce coup de projecteur sur le vélo à l’occasion du renouvellement des instances départementales et régionales est stratégique. Aux dernières municipales, le vélo a été le sujet transport numéro un débattu par les candidats. Nous voulons qu’il en soit de même pour ce scrutin de juin 2021 qui peut marquer un tournant tout aussi majeur.
Olivier Schneider : Maintenant qu’il y a un Plan national vélo sincère et financé, maintenant que tant de villes sont engagées dans des politiques cyclables ambitieuses, il ne manque plus que les départements et les régions pour obtenir un système vélo complet et sans coupures. Cela tombe bien : les deux élections ont lieu en même temps ! Quoi de plus naturel que de sourcer nos 450
associations auprès de Vélo & Territoires qui a toute la connaissance sur les compétences de ces strates essentielles du millefeuille territorial.
2. Quels sont vos objectifs respectifs à travers Parlons Vélo ?
Camille Thomé : Notre ligne de mire, c’est la France à vélo 2030 avec 12 % de part modale. Les choses progressent : les actions vélo sont de plus en plus structurées dans les territoires et les investissements à des niveaux jamais atteints. Cependant, avec ses 3 % de part modale vélo aujourd’hui, la France est encore un pays en développement. Régions et départements peuvent faire beaucoup plus sur ces questions. Leur ambition pour un mandat 2021-2027 pro-vélo se construit maintenant.
Olivier Schneider : Au-delà de compléter le système vélo, de faire fonctionner la complémentarité vélo + train ou de favoriser la pratique du vélo des collégiens, il y a aussi un enjeu de structuration interne du réseau de la FUB. La campagne nous force à trouver des référents régionaux et départementaux, et cela a plutôt très bien fonctionné. Une fois les élections passées, je suis convaincu que de véritables collectifs régionaux émergeront pour être des interlocuteurs bienveillants, mais exigeants, des futurs élus.
3. Pensez-vous que le contexte soit favorable à une mobilisation accrue des départements et des régions sur la question vélo ?
Camille Thomé : Nous avons conscience que la crise sanitaire, sociale et économique
aura des conséquences terribles sur les finances des collectivités territoriales. Pour autant, la situation a fait ressortir l’intérêt pour le vélo, devenu un geste barrière face à la Covid, une source de liberté et un outil de mobilité résilient, bas carbone, agile, efficace et inclusif. Le vélo est un investissement public rentable et peu de politiques publiques présentent de pareils atouts. Pour disposer de systèmes vélo complets, les régions et les départements sont des acteurs de premier rang.
Olivier Schneider : On a vu la mobilisation incroyable de nos concitoyennes et nos concitoyens pour l’ajout du vélo dans la loi Climat. Même si les élections régionales et départementales ne sont pas celles qui passionnent le plus les électrices et les électeurs, nous observons une dynamique incroyable. Je n’ose imaginer ce qu’il se passera dans un an pour les élections législatives et l’élection présidentielle !
Karine Lassus