Salons du tourisme : quelle place et quels enjeux pour la France à vélo ?
Un must à Utrecht et un mastodonte à Berlin. Les Départements & Régions Cyclables vous proposent une lecture de deux salons majeurs pour le tourisme en Europe et la place qu’y tient l’offre du tourisme à vélo en France sur fonds d’afficionados néerlandais, de grosse industrie de mutation à anticiper et de cocorico.
« Celui où il faut être » : retour du salon Fiets en Wandelbeurs aux Pays-Bas
La France était le pays le plus visible de ce Fiets en Wandelbeurs 2018 d’Utrecht aux Pays-Bas. Une quarantaine d’exposants et onze destinations ont valorisé le tourisme à vélo (et à pied !) en Hexagone, première destination préférée des Néerlandais. Avec 41 000 visiteurs, ce salon vélo et randonnée a doublé sa fréquentation de l’année précédente. Étonnant ? Pas tant. Ces filières sont très prisées aux Pays-Bas et deux salons vélo s’étaient raccrochés au « Fiets » sur 2,5 jours dans les espaces nationalement connus du Jaarbeurs, proche de la gare d’Utrecht, hub ferroviaire des Pays-Bas.
Certainement c’est « le salon où il faut être » pour les promoteurs des itinéraires et destinations français. « La France disposait de l’espace Destination le plus complet et représentatif du salon », relaie à juste titre le Bureau d’Atout France aux Pays-Bas dont les exposants français saluent le travail performant sur ce marché. Les attentes ? Dans ce salon dit business to costumer, les partenaires français ont pu échanger sur leurs circuits vélo et randonnées avec un public néerlandais particulièrement connaisseur, avide de nouveaux itinéraires et de conseils personnalisés. L’occasion de présenter des nouveautés, comme deux premiers topoguides en néerlandais pour l’EV1-La Vélodyssée, par exemple, ou des sessions de présentation d’itinéraires par un journaliste néerlandais auprès de 400 personnes.
ITB à Berlin, vitrine d’une industrie concurrentielle
À la vue de la quinzaine de halls d’exposition proposés à l’ITB à Berlin, le plus grand salon du tourisme B to B au monde, il devient aisé d’imaginer que l’industrie touristique représente 10 % du PIB mondial et un emploi sur 10. Le gros de l’offre proposée est loin de s’inscrire dans une perspective durable et assez éloignée du slowtourisme comme le tourisme à vélo par exemple. Ce qui n’empêche pas les connaisseurs d’en saluer le potentiel. « Le tourisme durable, c’est la coopération, pas la concurrence », explique Patrick Fritz de l’organisation mondiale du tourisme. « Le tourisme à vélo est un marché en pleine croissance. Encore un marché de niche pour l’instant, il reprend tous les éléments clés du tourisme durable ». Le peu de moyens alloués au tourisme et son mode de structuration sont souvent critiqués en France. Le cas partout ? « Au niveau européen, national ou même régional, le tourisme est important, mais ne reçoit pas l’attention qu’il devrait », concède Eduardo Santander, directeur opérationnel de la European Travel Commission. « En Europe, nous sommes nos propres pires ennemis. Collaborer au niveau transnational est notre seule chance de maintenir notre place de marché en matière de tourisme. » Et d’ajouter : « Le tourisme aujourd’hui, ce n’est plus une liste de sites à visiter, c’est une expérience. Le tourisme à vélo s’inscrit directement dans cette optique collaborative et expérientielle. Une vraie expérience française pour un touriste chinois, ce n’est pas faire la queue pendant trois heures à la Tour Eiffel entouré d’autres Chinois ». Le futur du tourisme en Europe dépendra de trois choses selon Eduardo Santander : la capacité à s’adapter dans un tourisme mondial en constante augmentation, l’accès à un tourisme transgénérationnel et inclusif et enfin la capacité à garder un équilibre.
La France était bien présente à l’ITB. Mais en dehors de l’Alsace dont les itinéraires cyclables sont valorisés au sein d’une offre vaste par ailleurs, point de vélo sous la bannière tricolore. La raison ? L’organisation en clusters affinitaires par Atout France pour la promotion touristique de la destination France dans son ensemble lui donne, sur ce marché allemand en B to B, une orientation « gros comptes » et peu ou pas de logique de filière. Doit-on pour autant déplorer l’absence de la France à vélo à cet ITB ? À la faveur de la première journée du tourisme à vélo organisée par l’ECF et l’ADFC*, cet ITB a donné lieu à une première : la remise de prix EuroVelo. La France y a été distinguée « Pays EuroVelo 2018 » et l’EuroVelo 15 a été récompensée itinéraire de l’année. L’occasion pour les Départements & Régions Cyclables et France Vélo Tourisme de valoriser la brochure « Vive la France » et de proposer les points de contact pour les huit EuroVelo en France aux participants de ce mondial du tourisme via le stand EuroVelo proposé par l’ECF. Modeste, oui, mais bien présent le vélo en Europe et en France à l’ITB.
*La fédération des cyclistes allemands (ADFC) et centre national de coordination pour EuroVelo qui profitait de cette grand-messe pour dévoiler sa Radreiseanalyse 2018 (rapport de voyages à vélo de 2018).
Camille Thomé
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