Quand le fleuve réinvente le tourisme
La 4e édition des Rencontres nationales du tourisme fluvial organisées par Voies navigables de France (VNF) début février à Bordeaux a rapproché les acteurs publics et professionnels du tourisme fluvial autour du thème « Quand le fleuve réinvente le tourisme ». Pari tenu semble-t-il puisque 600 personnes ont participé aux 3 tables rondes thématiques et 3000 rendez-vous d’affaire de la manifestation. Comment réussir un tourisme fluvial « augmenté » ? Telle était la grande question débattue autour de retours d’expériences.
Une mutation écologique nécessaire
Croisières fluviales sur des paquebots ou des péniches-hôtels, bateaux promenades, location de bateaux habitables… avec plus de 10 millions de passagers en 2016 et un chiffre d’affaires annuel entre 400 millions et 500 millions d’euros, le fluvial est un secteur touristique majeur en France. Doté d’un patrimoine de voies navigables exceptionnel, il doit cependant amorcer sa mutation écologique afin de préserver son attractivité. « Le tourisme fluvial reste parmi les modes les plus écologiques, mais si on n’est pas vigilant, cette image peut s’inverser », alerte Thierry Guimbaud, directeur général de VNF. La sanction des clients peut s’avérer particulièrement sévère. Les touristes fluviaux, étrangers pour près de la moitié, attendent une meilleure gestion des impacts environnementaux du secteur. Conscient de ces enjeux pressants, VNF a mis en place une expérimentation de collecte des eaux usées sur le Canal du Midi avec pour objectif zéro rejet dans l’eau d’ici 2019. Pour miser sur la conversion progressive des motorisations des flottes vers l’électrique, l’établissement public a également financé l’installation de dix bornes de recharge sur 150 km des canaux de la Marne au Rhin et de la Sarre. Ces initiatives entament le nécessaire changement d’un tourisme arrivé à maturité et le rattrapage du retard pris par la France sur ses voisins européens.
Vers des destinations fluvestres
« Les activités fluviales ont un très fort potentiel de développement. Pour générer plus de retombées pour le territoire, il faut travailler la destination en plus de la croisière. Car à un moment, le croisiériste descend. Des itinéraires sont donc à construire à partir de l’escale » souligne Michel Durrieu, directeur général du comité régional du tourisme de Nouvelle Aquitaine. Travailler l’offre et les initiatives autour du maillon fluvial connecte la richesse patrimoniale des territoires à la clientèle fluviale. Cette approche mise sur la structuration d’une destination à l’échelle d’un territoire fonctionnel, avec la voie d’eau comme colonne vertébrale, ses abords comme ramifications. « Nous devrons favoriser la collaboration, la concertation et le travail de concert avec les gestionnaires de voies d’eau, en lien étroit avec les CRT pour soutenir l’émergence et la promotion des destinations fluvestres d’excellence » plaide Michel Durrieu. Il ne fait aucun doute que l’association du fluvial et du cyclable contribue résolument à l’excellence territoriale. Le dialogue constructif entre les acteurs des deux filières à l’échelle nationale et locale et une gouvernance partagée des projets fluvestres y participent, à l’instar de la démarche dans laquelle les DRC et VNF se sont engagés depuis 2016.
Fécondité de l’offre fluviale
L’enjeu est clairement identifié pour les années à venir : faire entrer le tourisme fluvial dans une nouvelle ère, celle des « territoires fluviaux à vivre ». Pour Frédéric Millet, responsable de la division tourisme, territoires et services à la direction du développement de VNF, la réponse ne consiste pas nécessairement à créer ex nihilo, mais à « combiner les éléments qui fonctionnent déjà ». Et d’ajouter : « J’aime bien l’idée de fécondité de l’offre fluviale. Nous devrons créer de la vie autour du réseau fluvial. 5 % des touristes fluviaux ne viennent que pour la navigation. Tous les autres souhaitent découvrir la vie locale, ses acteurs, ses cultures et son patrimoine. » Des produits combinés vélo et bateau sont très prometteurs pour offrir un nouveau visage aux territoires fluviaux. « Nos séjours combinés permettent de raconter une histoire autour du fleuve. À vélo, nos clients découvrent des lieux qu’ils ne verraient pas depuis l’eau » témoigne Jan Timmermans du tour-opérateur néerlandais Boat-Bike Tours. Avec 8000 km d’itinéraires nationaux situés à moins de 5 km d’une voie d’eau, la France dispose d’un potentiel majeur de développer des produits combinés, alliant vélo et bateau. La redynamisation de l’offre fluviale se traduit également par la requalification du bâti vacant. C’est le cas par exemple de la maison éclusière du pont-canal de Briare dont le réaménagement en gîte est prévu d’ici 2019 suite à un appel à projets de VNF ou de la maison éclusière du canal de Montech sur la V87, transformée en brasserie contemporaine par le chef étoilé Christian Constant.
Assembler, décloisonner les secteurs, sortir des sentiers battus… le développement d’un tourisme fluvial « augmenté » dépendra décidément du lien créé entre les différentes démarches dans les territoires et la construction d’une vision fluvestre autour de la voie d’eau. La nouvelle exposition photos présentée par VNF et Atout France contribuera sans doute à redynamiser l’image du secteur et à promouvoir l’identité fluviale française.
Dorothée Appercel
Cet article est réalisé dans le cadre du partenariat entre les DRC et VNF.
Crédits photo : Image à la une – Stand VNF sur le forum d’exposition des Rencontres nationales du tourisme fluvial à Bordeaux ©VNF/Alexandra Lebon