Le Jura – Loisirs et sport, du vélo pour tous les goûts
Extrait de Vélo & Territoires 38
Patrie de Rouget de Lisle, d’Edgar Faure et de Louis Pasteur, le département du Jura s’est doté en 2011 d’un schéma directeur en matière cyclable. Le point sur une tranche de Franche-Comté de premier choix.
Interview de Céline Dubrulle
Responsable de la mission Déplacements doux au sein du CG39
À quand remonte le déclic vélo sur le territoire du Jura ?
L’élaboration du premier schéma départemental des véloroutes et voies vertes remonte à 2004, mais le véritable déclic date de juin 2011. C’est en effet cette année-là que les élus départementaux adoptèrent un plan vélo. C’est également cette année-là qu’une mission “Déplacements doux“ fut créée dans les services.
Quels sont les grands axes de la politique cyclable du Département ?
Notre politique cyclable s’articule autour de quatre axes. Le premier axe concerne la réalisation des infrastructures du schéma départemental. Ce schéma porte sur 185 km, dont 135 km sont en site propre. Il concerne un total de cinq véloroutes. L’ensemble forme ce qu’il est convenu d’appeler le “Grand C”, à savoir : l’EuroVelo 6 qui va de l’Atlantique à la mer Noire, la Voie des Salines vers Salins-les-Bains, la voie qui relie Lons-le-Saunier à Dole, la Voie PLM (Paris-
Lyon-Méditerranée) vers Champagnole, et enfin la Voie bressane vers la Saône-et-Loire.
Sur quoi porte le deuxième axe de cette politique cyclable ?
Le deuxième axe porte sur le développement d’une signalétique propre au vélo. Cet axe concerne les deux tours du Jura à vélo, les boucles locales vitrines, la Grande traversée du Jura à vélo et les ascen-sions remarquables… Le troisième axe, lui, concerne l’accompa-gnement des collectivités dans la mise en oeuvre d’infrastructures ou d’itinéraires d’intérêt local. C’est ici que nous retrouvons les schémas de déplacements doux, les plans de déplacement des collèges, les aides dans les traversées d’agglomérations ou la signalisation des boucles locales vitrines.
Quel est le quatrième et dernier axe ?
Le dernier axe traite de la valorisation touristique et de la promotion des itinéraires cyclables. Cette thématique regroupe tout ce qui a trait à la signalétique d’information et de services le long des
cinq véloroutes, mais aussi à la labellisation Tourisme et Handicap de plusieurs tronçons ainsi qu’à la mise en place de vélogardes.
Combien de kilomètres ont déjà été aménagés à ce jour ?
110 des 185 km de notre schéma départemental ont déjà été aménagés. 75 km sont en site propre et 35 km en routes partagées. Par ailleurs, deux Tours du Jura à vélo, le loisir et le sportif, chacun
portant sur une itinérance de deux à quatre jours, ont été jalonnés sur routes partagées. Le Tour du Jura à vélo loisirs s’adresse aux familles. Il porte sur 150 km et compte moins de 1 000 m de dénivelé positif. Quant au Tour du Jura sportif, il porte cette fois sur 250 km et représente
3 900 m de dénivelé positif.
Qu’en est-il des boucles locales ?
24 boucles locales vitrines ont été jalonnées sur des routes partagées, avec en tout quatre niveaux de difficulté. Le tout représente un total de 1 850 km de boucles cyclotouristiques. Par ailleurs l’implantation de bornes vélo nous a permis de mettre en valeur les onze ascensions jurassiennes les plus remarquables. Il convient enfin d’ajouter à tout ceci le jalonnement sur 68 km de la partie jurassienne de la Grande Traversée du Jura à vélo.
Sur quels tronçons porte ce qui reste à aménager ?
Les 75 km qui nous restent à aménager concernent notamment la voie reliant Lons-le-Saunier à Dole.
Quels sont les prochains aménagements prévus ?
À court terme, trois sections seront mises en service. Il s’agira tout d’abord d’une piste cyclable de 3 km sur l’EuroVelo 6 avec un tronçon en route partagée. Il s’agira ensuite de faire la jonction entre l’EuroVelo 6 et la vallée du Doubs, avec un nouveau maillon de la voie reliant Lons à Dole. Il s’agira enfin d’une voie verte reliant Arc-et-Senans et le Jura, la Voie des Salines.
Quel budget cela représente-t-il pour la collectivité ?
Depuis 2011, le Conseil général a investi 5,3 millions d’euros dans son plan vélo. Pour 2015, malgré un contexte budgétaire tendu, 900 000 € y seront consacrés.
Comment cette action départementale s’inscrit-elle à l’échelon régional ?
Notre schéma départemental a été intégré au schéma régional des véloroutes et voies vertes en 2013. La Région et le Département ont passé une convention financière pour sa réalisation. L’aide régionale s’élève à 1 million d’euros.
Quid au niveau de l’intercommunalité ?
Un important travail a été réalisé entre le Département, les communautés de communes, le comité départemental du Tourisme et le CODEP 39 FFCT afin de mettre en place les boucles vitrines. Le Département a également lancé un appel à projets pour la réalisation de schémas de déplacements doux. À ce jour, 21 communautés de communes ont répondu sur les 24 que compte notre territoire. Leur élaboration est subventionnée à hauteur de 50 % dans la limite de
10 000 € HT de subvention. Par ailleurs, les communautés de communes ou d’agglomérations participent également à hauteur de 15 % à la réalisation des véloroutes qui traversent leur territoire.
Et à l’échelon européen ?
Une partie de la voie PLM a été subventionnée par le FEDER-Massif et un dossier sera déposé dans le cadre des nouvelles politiques régionales que l’Union européenne vient d’approuver.
Quelles difficultés rencontrez-vous pour la mise en place de cette politique cyclable ?
Le Jura est un département qui présente des caractéristiques géographiques très différentes, passant de la plaine doloise au Revermont, avec des reliefs plus difficiles dans le Haut-Jura, ce qui diversifie notre offre avec du vélo “loisirs” et du vélo “sportif”. Cette variété est donc aussi un atout. C’est aussi un département rural qui comporte beaucoup d’espaces protégés, notamment des zones humides. Cela nous conduit à privilégier la réutilisation de chemins existants. Et ça explique
pourquoi il est plus difficile de mobiliser des moyens financiers.
Qu’en est-il de la signalétique et du revêtement ?
C’est l’un des axes forts de notre politique. Le Département a établi en 2011 une charte de signalisation des itinéraires cyclables qui s’applique à tous les itinéraires sur routes départementales et, bien sûr, aux véloroutes. Au niveau des revêtements utilisés, ils sont choisis en fonction des usages que l’on veut accueillir avec le vélo (piétons, rollers…) et des usages existant lorsque qu’on emprunte des chemins privés. Les types de revêtements privilégiés sont les enrobés et les enduits. Lorsque c’est techniquement possible, la structure est réalisée par retraitement en place des matériaux existants.
Est-ce qu’un comptage a été mis en place ?
Deux compteurs permanents ont été installés sur l’EuroVelo 6. Ils se situent à Baverans et Choisey, près de Dole. Pour ce qui est des fréquentations 2013, Baverans est le second compteur en nombre moyen de passages journaliers en milieu rural sur le tracé français de l’EuroVelo 6.
Comment s’organise la communication autour de cette politique ?
Sur le plan de le communication touristique, le Conseil général participe au club “Jura Vélo” piloté par le comité départemental du Touris-me du Jura. Ce club regroupe les offices de Tourisme du Jura, l’association Grande Traversée du Jura et le Parc naturel du Haut-Jura. Il définit les axes de communication et les actions de promotion de la destination Jura à vélo. Par ailleurs Jura Tourisme, qui n’est autre que le comité départemental du Tourisme, effectue la promotion de nos Tours du Jura à vélo et de nos ascensions remarquables dans les salons aux-quels il participe. De son côté le Conseil général organise des manifestations spécifiques chaque année à l’occasion de la Fête du vélo et pendant la Semaine de la mobilité. Pour le reste, la com-munication s’appuie également depuis deux ans sur les vélogardes en contrat d’insertion mis en place sur l’EuroVelo 6.
Qu’est-il prévu pour les collèges ?
Dans le cadre de la mise en place de son Agenda 21, le conseil général du Jura souhaite développer les mobilités actives au sein des collèges du département. Pour ce faire, des plans de déplacements des collèges (PDC ) ont été mis en place. Cette démarche est menée en lien étroit avec la direction académique mais aussi avec le conseil général des Jeunes. Elle a pour objectif d’encourager les collégiens à utiliser les modes de déplacements doux que sont la marche et le vélo, pour leur trajet domicile-collège ou domicile-point de ramassage scolaire.
Y’a-t-il des personnes clés sans qui rien de ce qui a été fait jusqu’ici n’aurait été possible ?
Le directeur général des Services a lancé les premières réflexions fin 2010 sur la politique et a pu, avec le soutien du président du Conseil général, mobiliser les services et les élus. De leur côté les membres de la mission Déplacements doux, eux-mêmes amateurs de vélo, ont mis en oeuvre efficacement la stratégie souhaitée.
Dominique Troncin
Vice-président du conseil général du Jura en charge des Infrastructures, des Routes et des Déplacements doux
Quelle place occupe le vélo parmi les autres priorités du conseil général du Jura ?
C’est en 2011 que nous sommes entrés en responsa-bilité au Département. Il existait déjà une politique cyclable à l’époque, mais elle était encore timide. Nous avons donc décidé de donner un bon coup de fouet à cette question des voies vertes, en commençant notamment par la mise en place de la Voie bressane.
Y’a-t-il eu un élément déclencheur à cette accélération ?
Le déclic restera sans conteste l’EV6. Voir affluer tous ces touristes sur la vallée du Doubs nous a encouragés à investir dans cette direction. Nous nous inscrivions en cela dans la continuité des démarches entreprises par nos prédécesseurs, en nous donnant cette fois les moyens d’accentuer ces efforts sur d’autres voies vertes.
Vos interlocuteurs se montrent-il réceptifs à vos arguments ?
Cette politique cyclable répond à une attente réelle. Nous avons la chance d’avoir une majorité plutôt en phase avec cette vision, et une opposition qui comprend la démarche. Bien sûr nous rencontrons aussi des résistances, notamment lorsque les itinéraires sont amenés à longer ou à traverser des territoires agricoles, des bois ou des parcelles dédiées à la chasse. Dans ce cas il nous appartient de créer les condi-tions d’un dialogue pour rassurer ces populations et trouver le meilleur compromis possible. La clé pour nous reste l’occupation du terrain et le fait d’insister sur la valorisation du territoire qui en découle.
Quel impact faut-il attendre de la prochaine réforme des collectivités territoriales sur la politique cyclable du
Jura ?
C’est une très bonne question ! [Rires] Tout dépendra de là où seront situées les compétences. Aujourd’hui nous demandons 15 % de participation aux communautés de communes et la Région nous apporte elle aussi son soutien financier. Et il faut bien garder à l’esprit que notre politique cyclable est désormais plus qu’amor-cée, avec des réalisations concrètes achevées ou en cours d’achèvement. Nous avons donc de bonnes raisons d’espérer que, quelle que soit l’autorité qui aura in fine la compétence sur ces questions, nous irons au bout des programmes engagés.
Et vous, trouvez-vous le temps de faire du vélo ?
J’ai beaucoup pratiqué le VTT . Le temps me manque aujourd’hui, mais je compense en partant de temps en temps en randonnée pédestre avec le club de chez moi, ou le temps d’un match de foot ou d’une partie de pétanque. Est-il utile de préciser que, avec les années, la pétanque tend à devenir un sport très prisé ? [Rires]
Propos recueillis par Anthony Diao
Pour en savoir plus : www.jura.fr ; www.jura-tourisme.fr ; www.eurovelo6-fr.com