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Les collectivités appelées à se mobiliser pour sauver le Plan vélo et marche

La colère était à son comble aux 28es Rencontres Vélo & Territoires à Golfe du Morbihan-Vannes agglomération suite à l’annonce du gel total du Fonds mobilités actives. Une lettre ouverte lancée par Vélo & Territoires et le Club des villes et territoires cyclables et marchables demande au Gouvernement de poursuivre le soutien promis : les infrastructures cyclables ne relèvent pas que du local et ont besoin de l’appui de l’État. Pour les maîtres d’ouvrage, la suppression pure et simple d’une politique publique efficace et nécessaire est inacceptable et il ne faut pas rompre la confiance. Une semaine après son lancement la lettre ouverte a déjà recueilli la signature de près de 250 collectivités, de la commune à la région. La récolte de soutiens et de signataires se poursuit pour faire pression.

Un coup d’arrêt pour au moins quatre ans

Au départ, le Gouvernement annonçait 1,25 milliard d’euros d’investissement sur 2023-2027 pour porter à 80 000 km en 2027 et 100 000 km en 2030 les aménagements cyclables sécurisés. L’engagement pris était de mobiliser le Fonds mobilités actives à hauteur de 250 millions d’euros par an pour permettre à des centaines de collectivités, de toutes tailles et typologies, de créer des passerelles, sécuriser des carrefours, aménager des linéaires cyclables protégés, …

Un an plus tard, le Gouvernement annonce vouloir défaire un des piliers les plus prometteurs de son action climatique. « Le contrat de confiance est rompu », ne décolère pas Chrystelle Beurrier, présidente de Vélo & Territoires en ouverture des 28es Rencontres Vélo & Territoires. « Quand on annonce des choses, on va jusqu’au bout. » Plus de 400 projets d’aménagements cyclables en attente depuis fin 2023 risquent de rester lettre morte. Pour les collectivités, déjà confrontées à des contraintes budgétaires, cette suppression est inacceptable. Elles le dénoncent via une lettre ouverte adressée au Gouvernement.

« Ce coup d’arrêt aux politiques cyclables a aussi un fort impact symbolique. Cela signifie que le vélo, ce n’est pas important », indique Françoise Rossignol, présidente du Club des villes et territoires cyclables et marchables. À dix-huit mois des élections municipales, cela signifie aussi que « les projets vont être suspendus, … on en a pour au moins quatre ans à les remettre à l’agenda ! ». « C’est aussi un manque de respect pour tous ceux qui ont travaillé sur ces projets, y compris les services de l’État », poursuit Benjamin Flohic, membre du conseil d’administration de Vélo & Territoires et élu en charge de la politique cyclable à la région Bretagne, où quinze projets sont concernés par le gel.

Table ronde d’ouverture « Réinventer la route » aux 28es Rencontres Vélo & Territoires ©Simon Bourcier

Mauvaises économies

Cette coupe budgétaire arrive au pire moment, alors que les schémas cyclables sont achevés et que la phase de travaux doit se lancer. « On partage la nécessité de faire un certain nombre d’économies, mais pas des économies absurdes », déclare Françoise Rossignol, également maire de Dainville (Pas-de-Calais). « Les communes ont établi des schémas cyclables. On doit passer à la réalisation, et c’est à ce moment qu’on voit disparaître l’accompagnement », qui représente parfois 60 % du budget des travaux. « Si on n’avance pas dans les six mois, c’est fichu pour ce mandat et ça va casser la dynamique qui se structurait. » Il faudra ensuite acculturer de nouvelles équipes, refaire les études et repayer les bureaux d’études. « Et ça ne sera plus le même prix », affirme Chrystelle Beurrier.

Les impacts de cette suppression du Fonds mobilités actives pour 2024 et 2025 vont bien au-delà des économies modestes ainsi réalisées : la sécurité des cyclistes, quels que soient leur profil et leur âge, la lutte contre le réchauffement climatique, la décarbonation des mobilités, les coûts de santé évités, la solidarité territoriale et l’efficacité des investissements pour les mobilités actives sont sacrifiés. « Il n’y a pas de bon moment pour faire des économies, mais il y a des mauvaises économies », résume Frédéric Cuillerier, président de la commission Transports à l’association des maires de France et présidents d’intercommunalités.

Les pistes de financement alternatif sont faibles. Le Fonds vert perd un nouveau milliard d’euros par exemple. Même « les contrats de plan État-région qui ont fléché 800 millions d’euros sur le vélo » selon Rodolphe Gintz, directeur général des transports au ministère du Partenariat avec les territoires et de la Décentralisation, ne suffiront pas. « Les régions ne peuvent pas remplacer l’État. Ce dernier demande toujours plus aux collectivités dans un contexte budgétaire toujours plus contraint », décrypte Benjamin Flohic. Le vrai risque, c’est de voir en effet cascade les financements régionaux et départementaux en direction des communes et intercommunalités se restreindre comme peau de chagrin sur les questions cyclables.

Que vont devenir les projets cyclables déposés pour le Fonds mobilités active ? « Chaque collectivité doit faire l’état de ses finances pour décider », indique Françoise Rossignol. À plusieurs reprises les deux réseaux de collectivités en cours de fusion ont rappelé à quel point la pluriannualité des appels à projets du Plan vélo était indispensable et louable pour que les collectivités s’engagent dans des projets cyclables sereinement et efficacement. Elles ont besoin de travailler dans le temps long avec l’État comme interlocuteur et accompagnateur à leurs côtés. « Les priorités du Département, c’est la protection de l’enfance, le handicap, les personnes âgées. Je ne sais pas dans quelle mesure nous pourrons accompagner les communes et les EPCI sur le vélo. Il est certain que des communes ne pourront pas lancer leurs travaux », souligne Chrystelle Beurrier, également vice-présidente déléguée à l’enfance, la famille et l’insertion au département de la Haute-Savoie, co-organisateur des premières Rencontres du réseau unifié du 1er au 3 octobre 2025 à Annemasse. Les collectivités se retrouvent aujourd’hui dans cette équation alors qu’elles sont unanimes sur la nécessité d’aménager pour le vélo. Seules quelques-unes, à l’instar du département du Morbihan, réussiront à préserver une priorité sur le financement des aménagements cyclables.

Dorothée Appercel

Pour aller plus loin :

  • Signez et faites signer la lettre ouverte de Vélo & Territoires et du Club des villes et territoires cyclables et marchables
  • Consultez le communiqué de presse post-Rencontres Vélo & Territoires

Politiques cyclables