Indemnité kilométrique vélo : vers une application dans la fonction publique ?
Premier pas encourageant vers une application de l’Indemnité kilométrique vélo (IKV) à destination des agents de la fonction publique : une expérimentation est en cours pour les agents de deux ministères. Si l’efficacité de l’IKV pour encourager les déplacements actifs dans les trajets domicile-travail a déjà été démontrée par une expérimentation dans le secteur privé en 2014 – 2015, d’importantes interrogations subsistent quant à sa généralisation et aux conditions de sa mise en œuvre pour la fonction publique territoriale. Pourtant, les collectivités sont prêtes à agir.
L’IKV, de quoi s’agit-il ?
Au regard des multiples bonnes vertus du vélo, l’IKV encourage les salariés à utiliser le vélo comme mode de déplacement pour les trajets domicile-travail. Facultative et plafonnée à 200 € pour les exonérations de charges et d’impôt sur le revenu, son montant est fixé à 25 centimes net par kilomètre. Voir l’article de Vélo & Territoires n°39 de 2015 . Repris dans la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte votée en juillet 2015, les décrets d’application de l’IKV pour le secteur privé ont été publiés début 2016.
Les effets de l’IKV ? Deux phases d’expérimentation de l’IKV ont été lancées de juin 2014 à juin 2015 par l’Ademe et la Coordination interministérielle pour le développement de l’usage du vélo. Alors que la première phase avait montré une augmentation de 25% de la part modale du vélo au bout de quelques mois, après une année d’expérimentation l’augmentation mesurée est de 125%. « La part modale continue donc de croître, essentiellement grâce à une augmentation de la fréquence de pratique, ou autrement dit par une pratique devenant de plus en plus régulière chez les nouveaux cyclistes » selon le rapport final de l’Ademe.
L’expérimentation dans le secteur public
Depuis le 31 août dernier, un décret autorise une expérimentation sur 2 ans de l’IKV pour les déplacements effectués par les agents relevant des ministères de l’Environnement, du Logement et des établissements publics qui en dépendent. Au total, près de 40 000 agents peuvent bénéficier de ce dispositif pour leurs déplacements à vélo sans ou avec assistance électrique entre leur résidence habituelle et leur lieu de travail, à condition qu’ils utilisent leur vélo pour 75% des jours travaillés. En dehors de ces ministères, pour l’heure, l’IKV n’est toujours pas applicable à la fonction publique territoriale qui représente en France plus de 1,9 millions de salariés.
Les initiatives des collectivités
L’application de l’IKV dans le secteur public est attendue par bon nombre de collectivités. Avant même la publication d’un décret spécifique à la fonction publique, certaines collectivités ont voté un vœu ou délibéré en faveur de l’IKV pour leur personnel. Illustrations de la part de collectivités adhérentes aux DRC : le département de Seine-Saint-Denis a anticipé la mise en œuvre de l’IKV dans le cadre du renforcement de son Plan de déplacement d’administration (PDA) par délibération en novembre 2015. L’application est renvoyée à la sortie d’un décret qui fixera le montant pour la fonction publique. C’est également le cas de la région Centre-Val de Loire qui a adopté une délibération sur la mise en œuvre de l’IKV pour ses agents en novembre 2015 et renvoie son application à la parution du décret.
Le département de l’Isère, lui, a délibéré en faveur de l’IKV en mai 2015 et alloue depuis l’IKV à ses agents utilisant leur vélo personnel pour les déplacements domicile-travail. 161 agents sur les 4 600 que compte le Département (soit 3,5%) ont opté pour cette prise en charge sur la période de juillet 2015 à juin 2016. Pour encourager le personnel à se déplacer à vélo, la mise en place de l’IKV est couplée à une augmentation du nombre d’arceaux vélo, à l’installation de stationnement vélo couvert et à une participation à l’achat de VAE. Ce dispositif isérois montre aussi les limites de l’incitation : l’indemnité convainc beaucoup plus dans les directions centrales que dans les territoires moins urbains.
L’IKV, un bon levier à intégrer dans un système vélo
Maturation lente, manque de retours, lourdeurs administratives…en dépit des résultats clairement positifs de l’expérimentation dans le secteur privé, le jeune dispositif indemnitaire a besoin de se faire connaître. Conscients de cette nécessité, le Club des villes et territoires cyclables et l’Ademe ont mis en place un observatoire de l’IKV destiné à valoriser les entreprises qui s’engagent dans cette démarche et à établir un suivi de sa mise en œuvre. 30 entreprises sont renseignées dans cet observatoire que complète une foire aux questions sur les conditions de mise en œuvre de l’IKV pour en faciliter la compréhension réglementaire et les modalités pratiques.
L’IKV constitue un levier incitatif pour la promotion de l’usage du vélo en France et les collectivités manifestent un intérêt pour la proposer à leurs agents. Le Conseil des Ministres du 2 novembre dernier fait figurer le « lancement d’une concertation avec les collectivités territoriales intéressées par la mise en place d’une indemnité kilométrique vélo » comme une action concrète susceptible d’être mise en œuvre dès maintenant. L’expérimentation aux ministères de l’Environnement et du Logement devrait mener, progressivement, à l’extension de l’IKV à la fonction publique d’Etat et territoriale et ainsi rééquilibrer le bénéfice de cette mesure.
Dorothée Franke