Conférence régionale du vélo : pour changer de braquet, l’Ile-de-France consulte
« Cette conférence régionale du vélo n’est pas un aboutissement mais un démarrage. A 200, nous aurons plus de bonnes idées qu’à 2. Si nous voulons encourager le vélo, il faut faciliter la vie de ceux qui l’utilisent » a conclut Valérie Pécresse, Présidente de la Région Ile-de-France, devant une salle comble d’élus, d’associatifs, d’entreprises et de collectivités franciliens, réunis en conférence régionale vélo ce 28 septembre à Paris.
Outre la grande consultation publique lancée sur le web pour recueillir les besoins et les suggestions des usagers quant à l’utilisation des 50 millions d’euros de budget régional, la Présidente veut « engager une action volontariste et installer un comité régional du vélo qui se réunira de façon régulière et posera les problématiques territoire par territoire ».
Enjeux
A 50% très urbanisé et 50% rural, le territoire contrasté de la Région Ile-de-France pose un défi de taille pour implanter le vélo de manière durable, structurée et ininterrompue. Stéphane Beaudet, Vice-président des transports de la Région Ile-de-France connait son sujet : « Nous souffrons, notamment dans la grande couronne, de coupures qui rendent les projets illisibles, voire complétement dangereux. Sur la question de l’intégration et le rabattement vélo dans les gares, nous n’avons pas toujours les cheminements adaptés vers les Véligo (les stationnements vélo en gares, ndlr). Combien de fois cheminons-nous sur une liaison cyclable qui finit sur un champ ? Combien de fois circule-t-on dans Paris sans savoir où rouler ? Nous avons aussi ces grandes liaisons de plusieurs dizaines ou centaines de kilomètres (comme La Scandibérique / EuroVelo 3). La réponse ne peut pas être uniforme. »
Véloroutes ?
L’Ile-de-France est au carrefour d’itinéraires du schéma national des véloroutes et voies vertes : La Véloscénie, l’Avenue Verte London-Paris, La Scandibérique, La Seine à Vélo, … Ces comités d’itinéraire ont le regard tourné vers la Région Ile-de-France dont ils espèrent une collaboration active puisque leur continuité, sur le principe et sur le terrain, en dépend pour partie. Pour les 900km de véloroutes nationales franciliennes qui la concernent, aujourd’hui réalisés à 59%, la Région a un rôle de coordination à remplir pour accompagner et stimuler la réalisation d’un schéma cohérent et efficace, « en priorisant sur des axes structurants, évitant le saupoudrage » selon les DRC. La continuité devra être assurée non pas sur 3 ou 5 km, mais sur 20, 40 ou 100 kilomètres, qui pourront être le support de pratiques touristiques ou de loisirs, mais aussi de mobilité.
VAE
Avec l’avènement du VAE, la zone de chalandise du vélo a considérablement augmenté et peut concurrencer l’autosolisme et les transports en commun sur des distances non négligeables… à condition que les cyclistes disposent de parcours adaptés. De fait, « 15% des utilisateurs de VAE se ‘démotorisent’ », illustre Christian Gioria d’Inddigo. Dans un contexte où « les enfants de 4e d’aujourd’hui ont 25% de capacité respiratoire en moins par rapport aux générations d’avant », d’après le président de la FUB, ce report modal est une question de santé publique.
Services
Dans la région la plus peuplée de France, les ateliers d’autoréparation et de remise en selle sont proportionnellement nombreux… et ne chôment pas. « 1,5 million de vélo sont jetés par an parce que les gens ne savent pas les réparer ou parce qu’ils ne s’en servent pas. Ça en fait de la matière première ! », témoigne Mathieu Ferré de Bicyclo à Plaine Commune qui accueille des personnes en insertion professionnelle dans des ateliers vélo. De l’humain, il y en a absolument besoin. « Il faut conseiller les gens et les prendre par la main pour qu’ils osent le vélo. Un PDE ou une IKV ont besoin d’accompagnement pour mener au changement modal. Un flyer, c’est bien mais la pédagogie et l’humain, c’est ce qui marche », explique Christian Gioria.
Accélération
D’intermodalité, de zones de pertinence, de coutures fines et d’apaisement des vitesses, il a été aussi beaucoup question lors de cet après-midi mobilisateur. « ‘Changer de braquet’ ne consiste pas à opérer une rupture », explique Stéphane Beaudet. « Nous devons nous demander ensemble pourquoi la part modale du vélo a tant de mal à décoller. Sur quoi avons-nous échoué ? Sur quoi devons-nous agir pour que cette part modale et la pratique décollent ? Avec la Région « stratège » de la mobilité, mettons collectivement en pratique l’utilisation du vélo au quotidien. Le vélo en Ile-de-France reste beaucoup cantonné aux loisirs ».
Acteurs
Valérie Pécresse compte beaucoup sur les participants réunis ce 28 septembre : « Notre objectif est de conduire une action régionale qui corresponde aux réalités du terrain. L’usage du vélo est un élément majeur de la qualité de vie en Ile-de-France. Il sera déjà compliqué de dépenser les 50 millions d’euros du plan. S’il faut plus, nous verrons. La Région est un ensemblier qui aide les communes, les intercommunalités, les départements, les ligues sportives, les clubs, les lycées, les gares … Votre rôle (d’acteurs du vélo, ndlr) est qu’à chaque fois que la Région donne des aides, le mot « vélo » soit dans nos esprits. » En marge de la journée, preuve de son engagement, Valérie Pécresse a signé la Déclaration « Les territoires à vélo » que Stéphane Beaudet avait lui-même signé plus tôt. Un premier acte fort pour « changer de braquet ».
Camille Thomé